Je partage ici un extrait du courrier adressé à la MDPH, qui récapitule mon état de santé physique et mental à cet instant T.
"Volet vie quotidienne :
Cette année particulièrement difficile autant au niveau physique que psychologique pour moi-même et pour ma famille (mon époux et mes 3 enfants de 17, 15 et 7 ans ) , mon état général s'est fortement dégradé m'empêchant de réaliser les activités simples de la vie quotidienne , de travailler , de m'occuper correctement de mes enfants et de la maison.
Mes activités de loisirs (promenades, randonnées, musées, lecture, peinture, cinéma, piscine, aller rendre visite à des amis, ) sont également très restreintes compte tenu de mon état de fatigue généralisé, des douleurs musculaires, articulaires et digestives chroniques induites par les traitements.
En effet tout me coûte " cher" en énergie. Mon oncologue m'a diagnostiqué une asthénie de grade 2 , engendrant en plus d’un besoin de sommeil ou d’être alité , une série de désagréments comme des tremblements incontrôlés des pouces, paupières, muscles, une tension basse (9/6 parfois), tachycardie et palpitations cardiaques ( jusqu’à 120 au repos).
Chaque geste ou activité demande un temps de récupération qui n'est pas proportionnel à l'effort réalisé.
De plus, les thromboses à répétition qui m’ont obligée à subir 5 opérations (pose et ablation de 3 chambres implantables à cause de thrombus sur les chambres même en étant sous piqûres anticoagulantes puis pose d'un piccline) ont entraîné une sténose de 50 % de la veine cave supérieure résorbée aujourd'hui. Cependant, la persistance de la thrombose (réduite à 2mm grâce aux traitements d’anticoagulants tous les jours et au retrait du matériel ) sur la veine cave entraîne toujours des épisodes d’œdèmes au niveau du cou et diminue ma capacité respiratoire. Ces symptômes sont récurrents à chaque cure de chimiothérapie mais également à distance lorsque je me baisse et me relève (trop vite : chutes de tension) et /ou à n’importe quel moment , quand je marche à l’extérieur, à la maison, lorsque j’attends debout trop longtemps, et même lorsque je conduis. La seule façon de contrer ces symptômes c’est de m’allonger ou m’asseoir et d’attendre que cela passe au bout de 45minutes.
Cette thrombose ainsi que la fatigue semblent certainement également responsables des nombreux vertiges, céphalées, trouble de la vision, malaise vagaux qui me tombent dessus de façon inopinée. Je suis donc obligée de fractionner toutes les tâches à entreprendre afin de réduire la douleur ou récupérer de ma fatigue car je manque tout simplement de force. Suite aux traitements et à l'opération hépatique j'ai perdu 8 kilos essentiellement en masse musculaire que j'ai bien du mal à récupérer. Je me suis stabilisée à 2 kilos de plus c'est-à-dire 69 kg pour 173cms.
Dans ce contexte la station debout prolongée m’est très pénible et mes douleurs du genou suite à mon accident de travail réapparaissent. La station assise trop longtemps m’est également éprouvante car la zone anale est toujours fragile.
La marche est également compliquée pour plusieurs raisons : la radiothérapie a entraîné une fibrose au niveau des plis inguinaux m'empêchant d'écarter les jambes à un angle raisonnable sans avoir mal, de les lever suffisamment sans gêne : j'ai la sensation d'avoir les jambes extrêmement lourdes à tel point que parfois je dois les soulever avec mes mains pour les placer. M'accroupir et me relever sont des mouvements que j’appréhende : je dois demander de l’aide à mon mari ou passer par la position à 4 pattes pour me relever. Je suis donc limitée dans les tâches domestiques pour attraper ou ranger tout ce qui est au ras du sol ou au fond des placards. Je ne peux pas non plus rester accroupie en appui sur mes cuisses donc je m’assois par terre.
Mon sommeil est très perturbé et irrégulier avec un endormissement difficile pollué par des angoisses nocturnes. Des douleurs musculaires (crampes dans les mollets, pieds, doigts) et articulaires ou intestinales me causent des réveils nocturnes fréquents. Souvent je me réveille à 5h du matin, je n'arrive plus à me rendormir et lorsqu'il est l'heure de se réveiller pour m’occuper de mon fils de 7 ans , je suis incapable de me lever car trop fatiguée.
A cause de cette nouvelle condition physique très médiocre à laquelle j’ai dû m’habituer, je ne peux presque rien prévoir sachant que chaque jour est différent : je peux être bien un jour puis mal le lendemain et dans la même journée être en forme un moment puis très fatiguée 1h après. Tout me prend beaucoup de temps, je suis lente dans mes gestes, dans mes pensées et dans mes déplacements.
D’autre part, la rectite radique et la chimiothérapie ont entraîné une inflammation quasi permanente et chronique du rectum et de l'anus ainsi qu'une incontinence anale avec des glaires et des selles incontrôlées, un ballonnement important, des gaz, des alternances de constipation et diarrhées et des spasmes abdominaux subits, violents et invalidants. Donc, dans mes déplacements j'anticipe la présence de toilettes à proximité, et j'ai toujours un rechange à ma disposition si besoin. Ces accidents digestifs m'obligent parfois à me changer 4 à 5 fois par jour en période de crise.
Les repas sont également compliqués à prendre à cause d'une mucite (grade 2) importante à la bouche, des maux d'estomac, des nausées très fréquentes, des crispations aigues de la mâchoire, tout cela entraîne une perte d'appétit, un dégoût alimentaire et même boire, ou m’hydrater correctement m’est parfois impossible .
Des tâches simples comme faire la vaisselle, étendre le linge, faire les courses , passer le balai ou la serpillière, préparer les repas, mettre la table ,servir mon fils de 7 ans et demi, aller le déposer et récupérer à l'école ( 8 minutes à pieds) , ranger, enjamber la baignoire pour me laver , descendre et monter les trois étages pour arriver chez moi, faire la queue à la caisse de supermarchés ou dans les musées ou recevoir des amis sont des activités qui m'épuisent rapidement et que je ne peux pas mener jusqu'au bout soit parce qu'il faut rester debout trop longtemps ou parce qu'il faut marcher trop longtemps.
En effet, les courbatures et les symptômes de malaise comme l'essoufflement, la tachycardie me forcent à m'arrêter. Il n'est pas rare que je doive attendre mon mari ou mes enfants dans la voiture ou assise sur un banc pendant qu'ils terminent une activité de marche en forêt , de loisirs ou de course.
D’un autre côté, le traitement de chimiothérapie a altéré mes fonctions cognitives et intellectuelles. J'éprouve des troubles significatifs en terme de capacité de concentration, d’attention, de réflexion, de mémoire rendant laborieux la lecture ( en effet depuis plus de 6 mois je suis incapable de lire un roman car je ne comprends plus le texte : je dois relire parfois 4 fois la même phrase, et mon cerveau modifie le mot lu ), l'écriture , ou même aider mes enfants dans leurs devoirs. J'ai également beaucoup d'oublis parfois des absences et j'ai des difficultés à réaliser des tâches complexes ou des doubles tâches.
Concernant mon expression orale il m'arrive souvent de chercher mes mots, d'oublier ce que je voulais dire. Mobiliser l'ensemble des ressources cognitives engendre une grande fatigabilité.
La conduite automobile sur de longs trajets est parfois difficile à cause de l’attention nécessaire et surtout avec le risque de malaise soudain et sans réel signe avant-coureur . C’est pourquoi j'évite d'être seule en voiture. Il m'est arrivé à quatre reprises de devoir m'arrêter sur le côté à cause des troubles de la vision. D'autre part les douleurs dans les jambes suite à la radiothérapie sont clairement ravivées par les longs trajets et nécessite une prise médicamenteuse pour me soulager et désenflammer la zone des plis inguinaux ( cortisone).
Concernant ma toilette j'ai parfois besoin de la présence de mon mari pour rentrer et sortir de la baignoire car mes jambes sont faibles ou pour qu'il m'aide dans le rinçage lorsque j'ai des pansements à ne pas mouiller.
Pour les loisirs j'aime beaucoup la marche dans la nature cependant je suis très limitée. La marche longue et sur des terrains en pente m’est devenue presque impossible : sans douleur ou fatigue exagérée, je suis limitée à un périmètre d'environ 1 km ( 500 m aller-retour sur du plat). Pour des randonnées plus longues ou en montagne, je dois faire des pauses très régulières et me mettre à l'ombre sachant que le soleil m'est interdit pendant un an.
Au final, chaque jour , je calcule, en fonction de ma forme physique au réveil, les activités que je pense être capable de mener sans trop de fatigue ou de douleur. Je priorise et je fractionne toutes les tâches de la vie quotidienne en fonction de ce paramètre. J'ai toujours une paire de béquilles dans ma voiture que j'utilise lorsque je me sens trop faible.
Pour toutes ces raisons depuis un an mon mari a cessé de travailler pour m'épauler dans mes soins et me permettre une convalescence dans les meilleures conditions. Il a en effet tout pris en charge et s'est occupé de moi-même, de la famille, de la maison et de toute la logistique de la vie courante. "
Extrait de mon courrier adressé à la MDPH, pour obtenir une RQTH et les cartes de mobilité inclusion, stationnement .
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